TL;DR : En mars 2025, des chercheurs affirment avoir détecté par radar un complexe souterrain inconnu sous les pyramides de Gizeh. L’annonce relance les débats entre avancée scientifique majeure et spéculations douteuses, appelant à une prudence méthodologique.
Les Structures Mystérieuses sous les Pyramides de Gizeh : Révélations et Controverses
Introduction
Le 15 mars 2025, une équipe de chercheurs italiens et écossais a annoncé lors d’une conférence à Bologne avoir détecté un vaste complexe souterrain sous les pyramides de Gizeh grâce à la technologie radar SAR. Ces révélations, qui n’ont pas encore été validées par des pairs, ont immédiatement suscité un débat houleux au sein de la communauté scientifique. Entre avancée archéologique majeure et scepticisme méthodologique, cette annonce soulève des questions sur les véritables fonctions des pyramides et leur rôle dans l’Égypte antique.
I. Les Découvertes sous le Plateau de Gizeh
Une exploration technologique inédite
L’équipe dirigée par Corrado Malanga (Université de Pise) et Filippo Biondi (anciennement Université de Strathclyde, aujourd’hui HarmonicSAR) a utilisé la technologie radar à synthèse d’ouverture (SAR) pour cartographier les sous-sols du plateau de Gizeh. Selon leur communiqué du 15 mars 2025, les résultats indiquent la présence d’un complexe souterrain massif comprenant :
- Huit puits cylindriques atteignant une profondeur de 640 mètres.
- Un réseau complexe de galeries spiralées reliant ces puits.
- Deux chambres cubiques mesurant chacune 80 mètres de côté.
Ces structures s’étendraient sous les trois pyramides principales (Khéops, Khéphren et Mykérinos), suggérant un projet architectural unifié dont la fonction reste inconnue.
Une technologie prometteuse, mais controversée
La technologie SAR permet de créer des images 3D en combinant des données radar et sismiques. Filippo Biondi a développé un logiciel propriétaire pour transformer ces signaux en modèles tridimensionnels détaillés. Bien que cette méthode soit innovante, plusieurs experts soulignent ses limites dans des substrats calcaires comme celui du plateau de Gizeh, où la pénétration radar est souvent limitée à moins de 100 mètres. Certains critiques estiment également que la qualité des données est trop imprécise pour affirmer l’existence de structures aussi profondes et complexes sans vérification directe.
II. Implications pour la Compréhension de l’Égypte Antique
Vers une révision des théories historiques ?
Si ces découvertes sont confirmées, elles pourraient remettre en question l’idée traditionnelle que les pyramides étaient uniquement des tombeaux royaux. Plusieurs hypothèses émergent :
- Fonction énergétique : Christopher Dunn propose que les pyramides aient servi à convertir les vibrations naturelles en énergie grâce à leur structure interne.
- Liens mythologiques : Nicole Ciccolo, porte-parole du projet, suggère que ces chambres pourraient correspondre aux légendaires « Salles d’Amenti », évoquées dans les textes funéraires égyptiens.
Les textes anciens, comme ceux de l’Égypte gréco-romaine ou les tablettes hermétiques, sont souvent évoqués pour appuyer ces interprétations, bien que leur lecture reste largement ésotérique.
Un défi pour l’ingénierie antique
La profondeur et l’ampleur supposées des structures soulèvent des interrogations sur les capacités techniques des anciens Égyptiens. Si ces excavations sont avérées, elles témoigneraient d’un niveau d’ingénierie bien supérieur à celui connu jusqu’à présent. Cela pourrait impliquer l’existence d’outils, de plans ou de savoir-faire disparus, ou bien obliger à reconsidérer la chronologie établie des grandes dynasties égyptiennes.
III. Controverses et Scepticismes
Critiques scientifiques majeures
La communauté scientifique a rapidement exprimé des réserves sur ces affirmations :
- Limites technologiques : Lawrence Conyers (Université de Denver) affirme que le radar SAR ne peut pas pénétrer à plus de 100 mètres dans le calcaire, rendant improbable la détection d’un réseau aussi profond.
- Absence de validation indépendante : Les résultats n’ont pas été publiés dans une revue scientifique à comité de lecture, ce qui limite leur crédibilité.
- Complexité géologique : Mamdouh al-Damaty, ancien ministre égyptien des Antiquités, rejette catégoriquement ces affirmations en rappelant que le plateau de Gizeh a été étudié pendant des décennies sans révéler d’anomalies similaires.
Précédents historiques : le cas Toutânkhamon
En 2015, une série d’études radar avait suggéré la présence de chambres cachées près du tombeau de Toutânkhamon. Ces anomalies se sont finalement révélées être des cavités naturelles après plusieurs analyses approfondies. Ce précédent souligne l’importance de la prudence face aux données radar non corroborées par des fouilles. Les médias s’étaient alors emparés du sujet, amplifiant les espoirs avant de relayer, avec beaucoup moins de bruit, les conclusions négatives.
IV. Théories Alternatives et Pyramidologie
Renaissance des hypothèses énergétiques
L’annonce relance l’intérêt pour certaines théories alternatives :
- Centrale énergétique antique : Popularisée par Nikola Tesla et Christopher Dunn, cette hypothèse propose que les pyramides aient servi à capter ou générer une forme d’énergie naturelle.
- Origines mystiques ou extraterrestres : Ces idées issues de la pyramidologie – une discipline pseudoscientifique née au XIXe siècle – évoquent des influences atlantes ou extraterrestres dans la construction des pyramides.
Critiques académiques
Les experts rejettent largement ces théories comme étant non fondées sur des preuves tangibles. Zahi Hawass qualifie ces spéculations de « fantasmes » qui nuisent à la rigueur scientifique nécessaire dans l’étude du patrimoine égyptien. La fascination pour les théories exotiques est compréhensible, mais elle détourne souvent l’attention des vraies avancées archéologiques, plus lentes et moins spectaculaires, mais autrement plus solides.
V. Vers une Nouvelle Ère de Recherche ?
Les prochaines étapes pour confirmer ou infirmer
Pour valider ces découvertes, les chercheurs recommandent :
- Des forages ciblés, réalisés sous supervision internationale pour préserver le site.
- Une collaboration interdisciplinaire associant géologues, archéologues et ingénieurs spécialisés en imagerie radar.
- L’utilisation d’autres technologies comme le lidar ou la gravimétrie pour corroborer les résultats radar.
Mais ces propositions posent aussi des défis éthiques et logistiques. Le plateau de Gizeh est un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO, et toute intervention invasive y est strictement encadrée. La coopération avec les autorités égyptiennes sera donc cruciale, tout comme la transparence méthodologique.
Défis politiques et patrimoniaux
L’accès au plateau de Gizeh est strictement contrôlé. Toute tentative de validation des résultats devra passer par les canaux officiels, souvent longs et complexes. De plus, toute annonce médiatique précipitée peut provoquer la méfiance des autorités locales, déjà confrontées à de nombreuses théories farfelues dans le passé. La patience et la collaboration semblent donc être les clefs pour faire avancer la recherche de manière crédible.
Conclusion
L’annonce d’un complexe souterrain sous les pyramides de Gizeh illustre le double visage de l’archéologie moderne : entre promesses technologiques et nécessité de prudence scientifique. Si ces structures se confirment, elles pourraient bouleverser notre compréhension historique et technique des monuments égyptiens. En attendant, seul un travail rigoureux basé sur des preuves tangibles pourra trancher entre avancée révolutionnaire et interprétation hâtive.